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Front de gauche de Lizy et du Pays de l'Ourq 77
13 août 2011

Si la dette est bien un problème, ce n’est pas celui que l’on prétend

Nous reprenons un article du regretté économiste Raphaël Thaller et de Lilian Brissaud (leur dossier complet "droit d'alerte" n°11) sur la dette publique. Des faits parlants et une analyse précise et claire.
Si la dette est bien un problème, ce n’est pas celui que l’on prétend

Par Raphaël Thalleret Lilian Brissaud, économistes.

« La dette publique, en d’autres termes l’aliénation de l’État, qu’il soit despotique, constitutionnel ou républicain, marque de son empreinte l’ère capitaliste. (…) Comme par un coup de baguette magique, elle confère à l’argent improductif un talent procréateur qui le transforme en capital, sans qu’il ait besoin de s’exposer au dérangement et aux risques des investisseurs industriels et même des placements usuraires ». (Marx, Le Capital).

« Les caisses de la France sont vides ».

Depuis des années, c’est le même refrain : nous dépensons trop et nous mangeons le pain de nos enfants.

En réalité, le thème de la dette publique a pour but de nous faire accepter une diminution des dépenses publiques, qui répond elle-même à l’objectif de diminution des impôts. Plus exactement : les impôts payés par les entreprises et par les classes riches de la société, c’est-à-dire le capital.

On peut alors montrer que si la dette constitue bien un problème, ce problème n’est pas celui que l’on prétend. De sorte que ceux qui n’ont pas de mots assez durs pour la fustiger n’ont en réalité aucunement l’intention de la supprimer.

Si l’État emprunte de l’argent, c’est pour pouvoir combler ses déficits budgétaires, c’est-à-dire la différence entre ses dépenses et ses recettes fiscales.

Ce déficit s’est élevé à 56 milliards d’euros en 2008 et à 100 milliards en 2009. Ce déficit ne provient pas d’un excès de dépenses publiques mais de la politique de baisse des impôts.

Ce phénomène a été reconnu par Gilles Carrez, rapporteur UMP de la commission des Finances de l’Assemblée nationale : « L’accumulation de baisses d’impôts depuis 2000 semble avoir conduit à un accroissement du déficit structurel car, si le taux de prélèvements obligatoires apparaît en baisse tendancielle sur la décennie, le taux de dépenses publiques, en revanche, reste stable. »

En clair : les dépenses sont constantes, les recettes diminuent.

S’il n’y avait pas eu toutes les baisses d’impôt effectuées depuis dix ans, les recettes de l’État auraient dû se monter en 2008 à 348 milliards d’euros, à comparer aux 265 milliards collectés en réalité.

Il manque donc chaque année au moins 83 milliards d’euros dans les caisses de l’État !

Cela concerne surtout l’impôt sur le revenu, payé par les plus riches, ainsi que l’impôt sur les sociétés : crédit d’impôt recherche, taxation réduite des plus-values, taxe professionnelle. Il faut y ajouter les droits de succession, le bouclier fiscal, la baisse de la TVA pour les restaurateurs.

Qui ne paie pas ses impôts s’enrichit.

Chaque année, le déficit se reproduisant au rythme des nouvelles baisses d’impôts, on entretient ainsi le mythe d’un État trop dépensier. D’autant qu’il existe en France une certaine aversion populaire à l’égard de l’impôt. La classe dirigeante s’appuie habilement sur elle pour véhiculer sa propre haine envers l’impôt, voie royale vers les privatisations et le démantèlement du service public.

En outre, la dette nourrit grassement la « classe des créanciers de l’État », que Marx déjà dénonçait.

Car on n’emprunte qu’aux riches. L’État se tourne vers ceux qui cherchent à prêter leur argent, c’est-à-dire à le placer : banques, assurances… Ce qu’on appelle les marchés financiers. Il s’agit d’une fonction spécifique au capitalisme : le capital de prêt, générateur d’intérêts.

On aura compris que ces « investisseurs » à qui l’État s’adresse sont ceux qui bénéficient des allégements fiscaux !

Ce que l’État ne leur prend plus sous forme d’impôt, désormais il leur emprunte, avec remboursement du prêt.

Quand on prétend que ce seront « nos enfants » qui paieront « nos dettes », c’est un jugement unilatéral, car ce sont les enfants des créanciers qui se feront rembourser par les enfants des débiteurs. La dette n’est donc pas une affaire entre générations, mais c’est un règlement de comptes, à l’intérieur d’une même génération, entre créanciers et débiteurs.

Au remboursement de la dette s’ajoute le paiement des intérêts.

Plus de 40 milliards d’euros sont ainsi versés chaque année aux créanciers de l’État. C’est le deuxième poste du budget.

Les créanciers vont demander des intérêts les plus élevés possibles, quitte à propager l’idée que l’État est en faillite, comme on l’a vu pour la Grèce.

Plus le débiteur est réputé pauvre, plus le risque d’insolvabilité est important, plus les intérêts à payer sont élevés : qui paye ses dettes s’appauvrit.

La Grèce a dû payer des intérêts deux fois supérieurs à ceux de l’Allemagne.

Or, les créanciers justifient la hausse du taux d’intérêt par le prétendu risque qu’ils encourent. Mais ils demandent aux États les plus riches, à l’Europe tout entière, au FMI, de garantir les prêts afin précisément de supprimer tout risque !

Il est enfin à noter que la dette publique s’internationalise : les sommes prêtées à l’État français par des créanciers étrangers sont égales aux sommes prêtées par des créanciers français à des États étrangers.

Les États conduisant tous la même politique fiscale, cela fait croire que chaque État est prisonnier des marchés financiers et tributaire de la bonne appréciation des agences de notation.

En réalité, c’est l’inverse : ce sont les « investisseurs » à la recherche de bons placements lucratifs qui sont dépendants des choix politiques délibérés effectués par les États à leur profit.

La dette publique est trop rentable pour disparaître.

Rentable économiquement, mais aussi politiquement, car elle fonde la baisse des impôts, qui est un vrai programme politique à elle toute seule.

 

      Ceci explique donc cela, je te donne, tu me prêtes etc...

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