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Front de gauche de Lizy et du Pays de l'Ourq 77
21 avril 2013

Zxamen de conscience

Reprise d’un article de Laurent Mauduit pour Médiapart.
Laurent Mauduit
Laurent Mauduit

En ces temps de crise, François Hollande a pris, un moment, la posture du dirigeant courageux dont la République avait besoin. Ce fut le dimanche 22 janvier, au Bourget. Ce jour-là, le candidat socialiste a cessé de ressembler au petit père Queuille, corrézien comme lui et tout aussi souvent indécis, et a pris des accents volontaristes dignes de Franklin Delano Roosevelt.

«Mon véritable adversaire, il n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti, il ne présentera jamais sa candidature, il ne sera jamais élu, et pourtant, il gouverne. Cet adversaire, c’est le monde de la finance», s’était-il emporté. Et de la parole aux actes ! Le champion des socialistes avait révélé que son projet présidentiel prévoirait des mesures énergiques pour terrasser la finance. C’était consigné noir sur blanc dans la plate-forme du candidat : «Je séparerai les activités des banques qui sont utiles à l’investissement et à l’emploi de leurs opérations spéculatives.»

Las ! Onze mois plus tard, il ne reste (presque) rien de cette belle promesse. Si la crise perdure, François Hollande, lui, a cessé de tonner contre la finance. Pis que cela ! Avec le projet de loi bancaire, qui sera examiné le 19 décembre en Conseil des ministres, il capitule devant elle. Sans même avoir combattu.

C’est peu dire, pourtant, que François Hollande avait eu raison d’annoncer un projet de réforme s’inspirant du célèbre Glass-Steagall Act, promulgué par Roosevelt le 16 juin 1933. Car, d’une époque à l’autre, de la grande crise des années 30 jusqu’à celle qui secoue aujourd’hui l’Europe, il y a des similitudes. Dans l’un et l’autre cas, ce sont les banques qui ont été au cœur du mécanisme de la crise – les banques qui se sont détournées de leur métier, celui du financement de l’économie, pour s’adonner à des activités spéculatives.

Dès sa victoire, en novembre 1932, Roosevelt comprend donc que, pour parvenir à relancer l’économie, grâce au New Deal, il doit briser les reins de la finance et de Wall Street. Et, pour cela, il lui faut encadrer l’activité des banques, en séparant leurs activités de dépôt de leurs activités d’investissement.

Or, depuis, la vague gigantesque de dérégulation qui a submergé la planète a fait son œuvre. Et, dans le courant des années 70, les vertueuses dispositions du Glass-Steagall Act ont été contournées par les banques américaines, avant d’être définitivement abrogées en 1999. On sait ce qu’il advint : alimentée par les banques, la spéculation a repris de folles proportions et a fini par déboucher sur la crise des subprimes, l’acte I de cette crise historique dont l’Europe n’est toujours pas sortie.

C’est donc à bon droit que François Hollande suggère, début 2012, qu’une nouvelle fois on remette l’ouvrage sur le métier. Et que l’on s’inspire de la première réforme de Roosevelt, torpillée par la finance. Au demeurant, quand il fait cette proposition, le candidat socialiste ne brille pas par son originalité. Car, dans de nombreux autres pays, une réflexion identique est engagée pour restaurer une meilleure régulation des banques. Aux Etats-Unis, avec la commission Volcker, ou encore en Grande-Bretagne, avec la commission Vickers…

Disons-le même tout net ! En ce début de 2012, le candidat socialiste aurait même eu mille raisonsde se montrer autrement plus ambitieux. En préconisant par exemple que la future Banque publique d’investissement dispose d’une force de frappe financière autrement plus considérable que celle des différents établissements financiers (CDC Entreprises, Oséo, Fonds stratégique d’investissement…) qu’elle va fédérer. Ou alors en remettant en question la quasi-privatisation du Livret A à laquelle Nicolas Sarkozy a procédé, déstabilisant du même coup les deux grandes missions d’intérêt général qui lui étaient liées : la rémunération de l’épargne populaire et le financement du logement social. Ou enfin – sacrilège des sacrilèges ! – en envisageant une nationalisation du secteur bancaire, pour briser la colonne vertébrale de la très conservatrice oligarchie française dont Nicolas Sarkozy était le porte-voix ; pour donner un coup d’arrêt à la spéculation et mobiliser toutes les énergies du pays vers l’emploi et l’investissement.

Mais de cela, François Hollande ne veut pas entendre parler en ce début de 2012. A tort ou à raison ? Il a, en tout cas, des accents si sincères quand il stigmatise la finance qu’on se prend à penser qu’il avancera au moins dans le bon sens…

Eh bien, non ! On sait maintenant qu’il n’en sera rien. Le projet de loi fera obligation aux banques de cantonner d’ici à 2015 dans des filiales spécialisées quelques activités très particulières, représentant de 2 à 3 % de leur bilan, comme leurs activités pour compte propre, et de mettre un terme à des pratiques hautement risquées comme le trading à haute fréquence ou l’achat-vente de dérivés sur matières premières agricoles. Mais le projet de loi n’ira pas au-delà de ces mesures cosmétiques. Et, en particulier, il n’organisera pas la scission promise entre banque de dépôt et banque d’investissement.

En clair, le puissant lobby des banques a gagné. Sur toute la ligne.

Histoire pitoyable ! C’est la défaite posthume de Roosevelt ; et la victoire du petit père Queuille…

Laurent Mauduit

Source : Marianne

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