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Front de gauche de Lizy et du Pays de l'Ourq 77
10 février 2012

fév 10 [Article] Robert Mundell, l’euro et les

Ceci est la traduction pour ce blog [merci à Valérie] d’un article du Telegraph signé du journaliste économique Ambrose Evans-Pritchard, qui réalise d’excellentes analyses de la Crise, malheureusement toujours débordantes d’europhobie. Il a rencontré Robert Mundell, prix Nobel d’économie 1999 pour sa théorie des Zones monétaires optimales, et est surnommé “le père de l’euro”.

Je ne partage pas tout, mais l’analyse de ces 2 regards non conformistes vaut la peine d’être lue – c’est en tous cas mon souhait de non-prosélytisme pour ce blog.

Par Ambrose Evans-Pritchard, The Telegraph, 25 août 2011

Après toutes ces années, j’ai enfin pu s’asseoir pendant une heure avec Robert Mundell, le grand théoricien des unions monétaires et le parrain de l’euro.

“Nous sommes en très grave danger. Le monde est en dépression dans les Big Three, aux États-Unis, en Europe et au Japon, une mini-dépression que nous n’avons pas connue depuis les années 1930″, dit-il, parlant lors de la conférence de Lindau, où la moitié des Prix Nobel d’économie du monde sont rassemblés sur une petite île aux rues pavées, et où les Alpes se reflètent dans le lac de Constance.

Peu d’économistes ont suscité autant de controverses que le professeur Mundell.

Il est un des héros de l’Amérique du marché libre, pour avoir parrainé le programme de réduction d’impôts de Reagan, et pour n’avoir pas cédé sur ce chapitre. “N’importe quel pays avec une dette publique de plus de 40 % du PIB doit critiquer (condamner) ses dirigeants”, dit-il.

Son ordonnance pour la maladie de l’Amérique est de ramener l’impôt des sociétés à 20 % (à partir d’un taux effectif de 52 %, dit-il), et de supprimer la monstruosité (le cerbère) qu’est la masse des programmes sociaux non financés. Par ailleurs, il accuse la Fed d’être responsable du déclenchement de la crise de Lehman en ayant été trop pingre de mi 2008 à fin 2008. Il y a désormais un très faible risque d’inflation suite à l’assouplissement quantitatif (QE), car la masse monétaire M1 correspondante s’est effondrée “de moitié” et devrait rester à ce niveau.

Mais il est aussi le méchant de la droite eurosceptique de ce côté du lac, après avoir fait de l’expérience européenne de change fixe l’œuvre de sa vie. Certains disent qu’il a tourné la théorie des «zones monétaires optimales» (“Optimum Currency Areas” – OCA) à son avantage pour justifier la combinaison d’économies européennes extrêmement différentes dans l’union monétaire – avec tout ce que cela implique pour la liberté et la légitimité démocratique.

Même à la lecture de son propre travail, de pionnier, sur les OCA – “Une théorie des zones monétaires optimales» dans l’American Economic Review de 1961 – il est difficile de voir comment la zone euro peut éventuellement survivre. Il a fait valoir ensuite que, même le Canada et les États-Unis pourraient avoir bénéficié d’une rupture entre dollars de l’Est et dollars de l’Ouest afin de refléter les économies régionales.

Doit-on y voir poindre des doutes maintenant, alors que la catastrophe de l’Union Economique et Monétaire (UEM) se développe ? Pas vraiment.
«Nous sommes au milieu d’une crise très forte parce que rien n’a encore été fait pour convaincre les marchés qu’il y a eu un changement fondamental. Pour sauver l’Europe, il doit y avoir un mouvement dans la direction d’un gouvernement partagé.”

Il admet que ne sera pas facile. Alexander Hamilton a réussi à créer un pool de la dette américaine en 1792 (face à une résistance acharnée), arguant que les dettes des 13 états étaient modestes et avaient été principalement accumulées durant la guerre d’Indépendance. Ce fut donc un intérêt partagé. Les retraites grecques ne sont pas du même type. “Vous ne pouvez pas faire ça en Europe”, dit-il.

“Il y a un énorme problème dans cinq ou six pays de la zone euro. Mais la solution n’est pas la fin de l’euro, parce que cela créerait plus de problèmes que cela n’en résoudrait. Il y aurait une ruée énorme sur le système bancaire, et les pays ayant abandonné l’euro auraient encore à faire face à toutes leurs dettes. ”

Le Professeur Mundell a déclaré qu’il serait utile que la BCE abandonne son mandat relatif à la stabilité des prix puis qu’elle prenne des mesures proactives pour forcer la baisse de l’euro, à 1,30 US$. Cela entrainerait la baisse de l’euro du même montant par rapport au yuan chinois, et créerait un système global à 3 voix – ou DEI comme il l’appelle.

“L’euro est trop fort. Un euro plus faible est la meilleure des nouvelles que vous pourriez donner aux gouvernements (en difficulté).”

“La BCE devrait suivre une politique plus simple. Bien sûr, elle a un règlement strict pour se protéger contre l’inflation, mais ce règlement n’est pas bon. Je n’ai jamais cru que les banques centrales devaient avoir un ciblage de l’inflation rigide. Ce n’est pas une bonne chose de se stabiliser. Il n’y a rien dans la théorie économique pour étayer cette thèse. ”

Il a ajouté qu’il est insensé de resserrer la politique monétaire pendant une flambée du prix du pétrole “déflationniste” (comme la BCE l’a fait en 2008 et comme elle vient de le faire à nouveau). “C’est exactement la mauvaise chose à faire”.

Mundell affirme que les États-Unis et l’Euroland devraient gérer le taux de change transatlantique dans un intérêt mutuel, par la création d’une zone de flottaison de 5 cents de chaque côté de la cible de 1,30 $. Si l’euro atteint 1,35 $, la BCE intervient pour acheter des dollars : si elle tombe à 1,25 $, la Fed achète des euros. Les deux banques centrales ont la gravité de leur côté puisqu’elles peuvent imprimer des sommes illimitées pour vaincre les marchés.

C’est une idée intéressante (il en a discuté avec le secrétaire au Trésor américain, Tim Geithner, qui a écouté attentivement) si vous aimez gérer les taux de change. Je n’en suis pas.
Je suis d’accord pour dire qu’un euro faible aiderait à lever la périphérie de l’UEM hors des récifs, mais cela arrive très tard et ignore le cœur du problème, à savoir que les monnaies sont massivement alignées au sein de l’UEM. L’écart de compétitivité des coûts salariaux unitaires entre le Nord et le Sud a augmenté de 30 %. Le Professeur Mundell ne semble pas avoir d’autre réponse à cela qu’une déflation destructrice dans le bloc du Club Med et en Irlande.

Comme son collègue le Prix Nobel Joseph Stiglitz l’a déclaré lors du même rassemblement à Lindau, les démocraties ne toléreront pas ce genre de “remède médiéval avec des sangsues”.
Le Professeur Mundell est cependant implacable: ” L’euro n’a rien fait de mal. Le problème est le manque de discipline budgétaire des pays comme la Grèce, le Portugal et l’Irlande qui ont procédé à une frénésie de dépenses», a-t-il dit.

Uhhm! Donc il n’y a rien de mal à combiner structurellement Grèce, Espagne, Irlande, Allemagne et Hollande dans une union monétaire? Rien de mal à infliger des taux d’intérêt réels négatifs depuis des années aux économies du Club Med et l’Irlande en croissance rapide ? Rien de mal à mélanger des taux de croissance de productivité considérablement différents?
Professeur, si on excepte la Grèce, la crise de l’euro n’est pas causée par le manque de discipline budgétaire dans tous les sens du terme. C’est un mythe wagnérien, bien promu par la chancelière Angela Merkel.

L’Espagne et l’Irlande n’ont jamais violé les limites de Maastricht sur les déficits. Les deux ont enregistré un excédent budgétaire important au cours du boom, lorsque la politique monétaire a été conservée pour aider à éviter à l’infirmière Allemagne une mini-crise. L’Italie est en excédent budgétaire primaire. L’Irlande est proche d’éliminer complètement sa dette publique.

Le vrai problème est que l’UEM a alimenté une bulle de crédit du secteur privé. Ce qui s’est avéré mortel.

Comme Jean-Claude Trichet de la BCE nous le rappelle constamment, les rapports dettes publiques / PIB en Europe sont inférieurs à ceux des États-Unis, du Royaume-Uni ou du Japon. Alors, pourquoi donc l’union monétaire souffre-t-elle d’une crise existentielle? Pourquoi la BCE devrait-elle intervenir pour faire cesser la spirale conduisant l’Italie et l’Espagne vers le défaut?

L’ensemble Euroland est visiblement inférieur à la somme des parties nationales. Ce qui invalide sans doute l’affirmation selon laquelle l’Euroland est une zone monétaire optimale. Il s’agit d’une «zone monétaire pessimale”.

Joseph Stiglitz affirme que les événements vont de l’avant indépendamment des vœux pieux politiques. Le taux de croissance de 8 % de l’Argentine, après l’abandon de son ancrage au dollar en 2001, offre un exemple tentant pour les pays en manque de consentement populaire et démocratique pour l’austérité imposée par Berlin, si l’Allemagne n’abandonne pas l’euro la première. “Il y a une vie après le défaut, et une vie après avoir quitté un régime de change fixe”, a déclaré Stiglitz.

On pourrait aussi ajouter que l’éclatement de l’étalon-or était le préalable nécessaire à la reprise dans le début des années 1930, car il a cassé une spirale négative qui contraignait les économies en contraction à se contracter plus encore.

Par ailleurs, allez visiter Lindau. C’est l’un des endroits les plus enchanteurs au monde, un joyau intemporel bavarois de l’ère Wittelsbach. Mais avec des racines remontant à la fin du Moyen-Âge lorsque le lac de Constance était le cœur intellectuel de l’Europe.

Il y a très peu de voitures.

Splendide !

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