L’article 24 de la Constitution de la Cinquième République française en ouvre le Titre IV, consacré au Parlement. Ses trois premières phrases définissent le rôle et le pouvoir de ce dernier : « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l’action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques. » En rejetant, par dix voix contre huit, l’audition du premier ministre, la majorité socialiste de l’Assemblée nationale a donc montré le peu de cas qu’elle fait d’un respect strict de la loi fondamentale, de sa lettre comme de son esprit, quand celui-ci risque de l’embarrasser. Car elle empêche ainsi la commission d’enquête présidée par le député centriste (UDI) Charles de Courson d’aller jusqu’au bout de sa mission constitutionnelle : contrôler l’action du gouvernement et évaluer les politiques publiques face à leurs « éventuels dysfonctionnements, entre le 4 décembre 2012 et le 2 avril 2013, dans la gestion d’une affaire qui a conduit à la démission d’un membre du Gouvernement », ainsi que le dit son intitulé.
Triste ironie de cette dérobade sous François Hollande, on doit cet énoncé sans ambiguïté du pouvoir des parlementaires, députés et sénateurs, à la présidence précédente, celle de Nicolas Sarkozy. C’est en effet la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a reformulé l’article 24, jusqu’alors totalement muet sur les pouvoirs du législateur face au pouvoir exécutif (les deux versions sont ici). Cette révision, approuvée de justesse grâce au renfort d’une voix socialiste, celle du député Jack Lang, s’était heurtée à un « non de déception » des parlementaires socialistes qui jugeaient la réforme « frileuse et incomplète », insuffisante à instaurer « un pacte démocratique propre à rééquilibrer notre République ».