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Front de gauche de Lizy et du Pays de l'Ourq 77
22 mars 2013

erreyr de navigation vue par Mélenchon

La crise à Chypre

Communiqué de Jean-luc Mélenchon

Déclaration d'Alexis Tsipras, Président du groupe parlementaire Syriza-USF

alexis06

Nous étions en réunion, en train d’analyser la situation de Chypre, quand tomba la nouvelle de la démission de Jérôme Cahuzac. L’ambiance délétère que Chypre déverse sur la légitimité de dirigeants européens assez stupides pour provoquer un risque de crise systémique bancaire s’aggrave en France d’une effarante ambiance de sortie de route du système gouvernemental. La direction du petit Parti de Gauche, à la veille de son troisième congrès, rencontre les événements qu’elle a prévus, annoncés et sur lesquels elle a construit son programme et sa stratégie. J’étais alors de retour du congrès de la CGT. La clameur qui avait accueilli l’annonce de ma présence aux bancs des invités m’emplissait encore le cœur d’émotion, de reconnaissance et de sens politique. Voilà qui fit mieux que compenser la tristesse de l’attaque gratuite et embolique de Daniel Cohn-Bendit contre moi face à Martine Billard. L’idiot utile du système en sera pour ses frais car il a donné des verges pour se faire battre. Le temps où on pouvait affirmer sans être contrôlé est bel et bien fini ! La blogosphère s’en est mêlée et Dany le jaune en sort davantage rabougri.

Lisbonne Le congrès de la CGT fait souffler un tout autre air. En France s’assemblent les éléments d’une capacité de riposte de la société dont le syndicalisme nourrit la force. Cette force se perçoit aujourd’hui elle-même non seulement comme une résistance mais aussi comme un projet concret pour le futur. Les pages du document d’orientation concernant le modèle du développement durable, et la multiplication des projets de coopératives en attestent. Comme c’était bon pour moi, le soir même à Toulouse de parler devant une salle comble, rassemblée en quelques jours, pour ma conférence sur l’éco-socialisme. Bon, allez zou ! Je vais faire ma valise pour le congrès de Bordeaux du PG. Avant cela j’aurai été à PSA, à l’invitation des salariés de l’usine en lutte. Quelle semaine exaltante que celle qui commence par le congrès du premier syndicat du pays et se conclut par celui de l’ardent Parti de Gauche.   

 

Le théâtre d'ombre

Que vit la démocratie parlementaire pendant ce temps ? Une comédie de plus : la motion de censure du gouvernement déposée par la droite. A cette occasion, Copé annonce qu'on va voir ce qu'on va voir… En fait on va voir une gesticulation sans objet. En démocratie, une telle motion confronte deux visions alternatives. C’est du sérieux. C’est un acte grave qui doit appeler la conscience civique. Bien sûr, l’exercice est assez formel dans la cinquième République, mais son sérieux devrait au moins sauver les apparences. Ce n’est pas le cas.

Lisbonne

Car que défend Copé de si alternatif que cela justifie une telle dramatisation ? Qu’a-t-il vraiment à reprocher au gouvernement ? Voyons. M. Guéant a dit tout le bien qu'il pensait de la politique de Manuel Valls, dure envers les faibles et les populations discriminées comme les Roms. L'adoption du traité Merkozy sur ordre de François Hollande après qu’il a abandonné sa promesse de renégocier le traité a fonctionné comme « reniement utile » selon Borloo. Il a surtout signifié une approbation de la politique européenne de Sarkozy et l’engagement de la poursuivre. En ce qui concerne les budgets d'austérité, la droite n'aurait pas fait mieux. En réalité elle a fait moins. Dès son premier plan d’austérité budgétaire Jean-Marc Ayrault a fait des coupes budgétaires du double de celle opérées par Fillon en deux plans de rigueur. Et puis, les parlementaires UMP voteront bien sûr, comme un seul homme, le projet de loi "Made in Medef" qui reprend quasiment l'accord compétitivité-emploi de Nicolas Sarkozy et qu’acclame le Medef. Ce n’est pas tout. Coïncidence fâcheuse, l’épisode chypriote éclaire crûment la connivence de la droite et du PS sur la loi bancaire inconsistante du gouvernement Ayrault. Cette loi est en débat au Sénat cette semaine. Elle ne touchera les grandes banques que d'une façon anecdotique. Elle n'interdit ou n'encadre les activités spéculatives que de façon marginale. Et elle n'oblige absolument pas les banques à séparer leurs activités de dépôts de leurs activités d'investissement. Encore une promesse de Hollande dont il s’avère, une fois de plus, qu’elle n’a été mise en scène que pour contrer notre influence électorale. Bref, cette loi bancaire est tellement favorable aux grandes banques que l'UMP monte en ligne aux côtés du PS pour la voter au Sénat. En effet les sénateurs Front de Gauche ne la voteront pas. Une fois encore, l'UMP et le PS voteront main dans la main pour contourner l'obstacle. C'est ce qui s'est passé en commission. Et Philippe Marini, président UMP de la commission des Finances du Sénat l'a dit clairement. Il a vanté assez cruellement « un débat consensuel, très loin de "la finance est mon ennemi" ». En fait, sur les sujets essentiels, la droite et le PS votent ensemble. Peut-on rêver mieux comme opposition de droite ? Il s'agit donc d'une motion de censure de pacotille pour une adhésion à une même politique : celle de l'austérité et de la « baisse du coût du travail ». En fait entre l’UMP et le PS, la connivence est permanente.

Dans l’affaire chypriote, cette complicité s’est affichée comme une évidence. Elle est d’autant plus écœurante que les solfériniens ne cessent de se donner des grands airs pour fustiger notre refus de nous soumettre à ses diktats sous prétexte que cela ferait le jeu de la droite. Fin février, Moscovici et le ministre allemand de droite Wolfgang Schäuble s'étaient félicités dans un communiqué commun de la victoire du candidat de droite à la présidentielle à Chypre. Selon eux, cette élection devait "permettre la formation d'un gouvernement qui pourra rapidement continuer les négociations sur le programme d'assistance financière à Chypre. Nous sommes confiants que le prochain gouvernement accélérera significativement le rythme des réformes en faveur d'une croissance soutenable et de la stabilité budgétaire et financière". Le précédent président de Chypre, un communiste, s'opposaient aux conditions de la troïka pour le "plan de sauvetage". On comprend pourquoi les libéraux des deux rives étaient contents de s'en débarrasser. Sur place les socialistes du cru avaient évidemment voté pour le candidat de droite. Comme en Grèce où François Hollande était venu nous tirer dans le dos et où il a encore refusé de recevoir nos amis de Syriza lors de sa dernière tournée.

 

 

Chypre, le début de l'avalanche

Au moment où j’écris, mardi soir, le Parlement chypriote a donc rejeté le plan "d'aide" européen. C'est une bonne nouvelle pour le peuple chypriote. Mais c’est aussi le début d’un enchaînement de circonstances désastreuses pour tout le système dont on va voir très vite l’insondable ampleur. C’est peut-être le commencement de notre heure en Europe. Les grands capitalistes ont des raisons d’être très mécontents de leurs domestiques politiques. Leur sottise et leur aveuglement idéologique vient de déclencher une crise majeure qui peut expédier tout le système à terre.

Dans cet épisode, les ministres européens des Finances montrent l'étendue de leur incompétence. Leur remède aggrave le mal. A peine avaient-ils annoncé leur "plan" que la panique s'est répandue partout à Chypre provoquant l’imminence d’un collapse bancaire. Le système bancaire chypriote est à présent, au vu et aux su de tout le monde, en perdition. Dans ce domaine la mauvaise réputation est fatale. Les banques ont dû être fermées jusqu'à jeudi pour éviter un écroulement généralisé du système. Elles ne peuvent plus assurer les dépôts des épargnants. Elles menacent de faire faillite. Pourquoi ? Parce qu'elles étaient gangrénées par la spéculation. Et parce qu’elles n’ont pas su masquer ni amortir les effets du petit processus d’annulation partielle de la dette grecque décidée ces derniers mois. J’en dis un mot d’explication.

Madrid

Depuis le début de l'attaque spéculative contre la dette grecque, nous répétons qu'il faut que la Banque centrale européenne prête directement à l'Etat grec à des taux très bas. C'est la seule solution qui permet de briser la spéculation. Au lieu de cela, les libéraux dogmatiques qui gouvernent ont imposé des cures d'austérité toujours plus drastiques. L'austérité a aggravé la crise économique. L'économie grecque s'est contractée de près de 20% en deux ans ! Il y a donc eu moins d'impôts et de taxes perçues. Et la dette grecque s'est creusée au lieu de se réduire. C'est le cercle vicieux que j'ai déjà présenté des dizaines de fois. Face à leur échec, les libéraux et les sociaux-libéraux européens auraient pu se ranger à l'idée de mobiliser la Banque centrale européenne. Non, ils ont préféré rester dans le cadre, ne rien changer à la règle du jeu en mettant au point une restructuration de la dette grecque. Cet exercice comprenait une annulation partielle de la valeur des titres de la dette grecque. Au royaume des menteurs qu’est le monde la finance et de la spéculation, personne n’a abattu ses cartes. Les grosses protestations des banques européennes n’ont ému personne, à juste titre. D’autant que la Banque centrale européenne achetait le papier pourri de titre de dette sur le « second marché ». Mais personne n’avait l’air de savoir que les banques chypriotes étaient déjà totalement enfoncées. En l'occurrence, les deux grandes banques de Chypre détenaient beaucoup de dette grecque. 4,5 milliards d'euros. Donc, en croyant atténuer le problème en Grèce, les dirigeants européens l'ont étendu à Chypre. Belle réussite !

Evidemment le système bancaire de Chypre était déjà extravagant. Ceci explique cela. Les banques de Chypre étaient déjà malades de la dérégulation totale de la finance. On apprend à présent que les oligarques, les banques et les grands groupes russes possèdent entre 20 et 30 milliards d'euros dans les banques chypriotes. Chypre est une sorte de paradis fiscal dans la zone euro. La finance chypriote a attiré ces fonds en profitant pleinement de la liberté totale de circulation des capitaux dans l'Union européenne, et entre l'Union européenne et le reste du monde. Ce modèle fou conduit à des situations incongrues. Ainsi, le président russe Vladimir Poutine se sent obligé d'intervenir dans le règlement d'une crise interne à la zone euro alors que son pays n'est pas membre de cette zone, ni même de l'Union européenne.

On apprend aussi que les banques chypriotes possèdent des actifs correspondant à huit fois la richesse produite par le pays. Dans ces conditions, le défaut d'une des deux grandes banques ferait exploser l'économie du pays et les finances de l'Etat ne suffiraient pas à garantir les dépôts des épargnants. Bien sûr, tout le monde crie au scandale. Mais personne ne se demande comment une telle chose a pu arriver. Ni comment il se fait que les importants moyens de la presse euro-bêlante ne lui ai jamais permis de voir la situation. Dès lors, le ministre français des Finances, Pierre Moscovici, a beau jeu de donner des leçons. N’était-il pas membre de la réunion où ces décisions stupides ont été prises ? Il ferait mieux de lutter contre la reproduction de cette situation en France : les actifs des banques représentent quatre fois la richesse du pays. Et à elle seule, la BNP possède des actifs supérieurs à la richesse produite par la France en une année !

La BCE, la Commission européenne et le FMI veulent faire payer le peuple pour la folie des banques. Ce fut le cas en Irlande, en Espagne et ainsi de suite. Comme aucun gouvernement n’a regimbé, lorsque le tour de Chypre est arrivé, la méthode était déjà prête. Compte tenu de la faiblesse de l’île, le plan pouvait même être plus féroce. C'est ainsi qu'ils ont imaginé leur "plan de sauvetage". Pour faire face à la situation de ses banques, Chypre aurait besoin de 17 milliards d'euros : dix venant des Etats de l'Union européenne, un milliard venant du FMI. Les 6 milliards manquant alors devaient être pris dans la poche des Chypriotes eux-mêmes. En fait, c’était un test. Ce plan est en effet le premier qui contient cette idée. Car la mesure est d’une violence sans précédent. Une telle idée n'a été appliquée en Europe que deux fois dans tous le vingtième-siècle selon le journal Le Monde. Et encore, que ce soit en Italie en 1992 ou en Norvège en 1936, la mesure était bien plus limitée que ce qu'ont proposé les dirigeants européens !

Ces six milliards de rançon, la troïka voulait les prélever grâce à une taxe sur les dépôts des particuliers et des entreprises dans les banques du pays. Avec sa brutalité habituelle, la troïka proposait que tous les épargnants soient taxés ! Ceux disposant de plus de 100 000 euros devait être taxés à 9,9% de leurs économies. Mais les petites gens qui ne disposaient que de quelques centaines ou milliers d'euros d'économies devaient aussi être taxées ! Que vous ayez un euro ou 100 000 euros, l'Union européenne proposait de vous taxer à 6,75% sur vos dépôts. Même si vous ne les retiriez pas et les laissiez à la banque. C'est cette invention stupide qui a provoqué la ruée sur les guichets, chacun essayant de sortir son argent avant d'être spolié. C'était une sorte de hold-up en silence, pour éviter aux actionnaires des banques de perdre leur mise. La légitimité d’une telle mesure est déjà on ne peut plus discutable du point de vue de la cohérence des eurocrates eux-mêmes. En effet, la directive européenne du 2 juillet 2010 prévoit que les Etats doivent garantir les dépôts des épargnants jusqu'à 100 000 euros en cas de défaillance des banques. Taxer ces dépôts est donc une violation de cette garantie. Bravo "L'Europe qui protège" !

Pour mémoire, notez que le système inventé n'était pas du tout progressif. D’abord parce qu’il contenait seulement deux tranches. A première vue c’était une belle combine à effet d’annonce comme les aime Hollande. Les plus riches paient davantage ! Couine ! Couine ! En fait ceux qui ont plus de 100 000 euros d'épargne ne seraient que peu touchés. Evidemment ! Quand on a plus de 100 000 euros  « d'économies », on ne les laisse pas sur un compte en banque. Ces sommes sont généralement placées en titres et produits financiers. Et ne sont donc pas touchées par la taxe. Enfin, notez bien la chose : les actionnaires des banques ne sont pas mis à contribution.

Sous la pression populaire et face à la panique créée, même la droite chypriote a refusé de voter un plan d'une telle violence. La crise s’étend donc. Au point que la troïka a dû modifier un peu son plan. Les personnes ayant moins de 20 000 euros d'épargne ne devraient finalement rien payer. Trop tard. Les protestataires ont pris le goût du sang. Ils ne seront pas faciles à faire rentrer dans leur boîte. En Argentine la crise a commencé exactement de cette façon. « Allons, allons, monsieur Mélenchon ! L’Amérique latine n’est pas l’Europe ! ». C’est bien vrai ma bonne dame, mon beau monsieur le journaliste ! Non, en effet, les « merkelistes » en Europe sont nettement plus balourds que leurs homologues d’outre-atlantique.

Pendant que les dirigeants européens s'accordaient, la panique a gagné les marchés. Je ne sais pas ni si elle s’arrêtera ni quand, ni à quel prix. Mais je note : pour la seule journée de mardi 19 mars, l'action de la BNP a chuté de 4,2% à la bourse de Paris, celle de la Société générale de 3,9%. Pour ces deux banques, le total correspond à une chute de la "capitalisation boursière" de trois milliards d'euros en quelques heures. Or ces deux banques françaises font partie des établissements systémiques c’est-à-dire capable de mettre en danger le système global en cas de difficultés. Voilà le magnifique résultat de l'indigence dogmatique aveuglée de la prétendue élite européenne ! En tous cas tout le monde apprend quelque chose dans cet épisode. C’est que les failles mortelles du système ne sont pas seulement dans ses lieux centraux. Justement : le talon d’Achille est… au talon.

Ce qui se joue à Chypre est un révélateur à plusieurs titres. Cet épisode illustre parfaitement la fragilité du système bancaire, sa folie et son caractère incontrôlable. Le jour où un domino tombera, il emportera peut-être tout avec lui. Ensuite, le plan imposé par la troïka est un exemple du caractère anti-social des plans "d'aide" de l'Union européenne. Celui-ci propose de faire payer les épargnants pour les folies des banques. Enfin, c'est un symbole du caractère anti-démocratique. Dans les précédents norvégien et italien, l'instauration d'une taxe sur les déposants avait été décidée souverainement par le parlement de ces pays. Là, elle sera imposée par l'Union européenne et le FMI. Comme le dit l'économiste Philippe Askenazy, directeur de recherche au CNRS, interrogé dans Le Monde : « Ce plan de "sauvetage" s'inscrit dans une ligne de décisions anti-démocratiques ».Petit à petit la thèse d’abord isolée que nous avons soutenue, sur le lien entre le déclin de la démocratie et la montée du système de l’Union européenne libérale est davantage partagée. Et le scénario de la rupture de la chaîne en un point méditerranéen et fortuit se confirme.

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