De quoi parle-t-on?

siege-ed-l-UMP-Paris-930x620_scalewidth_630(ci-contre: le siège de l'UMP. Faudra-t-il le vendre pour combler le déficit?) Pour pouvoir assumer ses dépenses de fonctionnement, l'UMP a emprunté près de 55 millions d'euros, auprès de quatre banques, en juillet 2012. Ces dernières ont exigé que le parti s'engage sur un plan de retour à l'équilibre en cinq ans. Soit une économie annuelle de près de 10 millions d'euros à réaliser d'ici à 2017. Avec le rejet du compte de Nicolas Sarkozy, c'est plutôt 12 millions d'euros que l'UMP devra économiser par an d'ici à 2017. Sinon, le parti sera contraint de repousser l'échéance. "Avec la perte de 11 millions d'euros sur lesquels on comptait, nous allons devoir renégocier avec les banques et étaler les remboursements après 2017", explique un cadre de l'UMP. (lemonde.fr)

La décision de rejet des comptes de campagne a été prise par le Conseil constitutionnel que Hortefeux a vivement attaqué (lien) sous prétexte que "trois de ses membres ont été nommés récemment par le pouvoir"... Opportunité de répéter une fois de plus que la droite considérera toujours comme illégitime un pouvoir qui ne procède pas d'elle. Trois membres au demeurant insoupçonnables - aucun n'a appartenu à un appareil partisan - sont nommés par Hollande, le Président de l'Assemblé et le Président du Sénat, qui s'ajoutent à six membres nommés par l'ancien pouvoir, plus Giscard d'Estaing (Chirac ne siège plus et Sarkozy s'est "déporté" le temps de cette délibération, ce qui était le minimum). Trois sur dix, c'est encore trop pour Hortefeux qui ne donne aucun argument tangible pour réfuter le délibéré du Conseil, uniquement un avis d'opportunité : ""Pour un si faible dépassement constaté, pourquoi une sanction aussi lourde ?"

takieddine_hortefeux_cope_inside3Le "faible" dépassement porte quand même sur 1.669.930 euros de dépenses (lien) que le candidat n'avait "pas ou avait insuffisamment" fait figurer dans ses comptes de campagne. Hortefeux a une manière d'apprécier les sommes que le Français lambda appréciera. A fréquenter des amis riches (et quelque peu sulfureux), qui plus est vêtu d'un bermuda à carreaux (faute de goût hallucinante), on perd le sens des mesures.

Le pire, c'est que pendant la campagne, de multiples voix se sont élevées en interne comme venant de l'extérieur de l'UMP pour sonner l'alarme. Avis que Sarkozy et la direction de l'UMP ont superbement ignorés. Il est un peu tard pour geindre.

A entendre les lamentations de la droite, l'UMP serait dans la dèche - ce qui a de quoi étonner. D'abord, un parti qui était déjà dans une situation délicate, qui vivait déjà à crédit (curieux quand on prône la rigueur au niveau national) est-il avisé de renoncer à des millions d'euros à la suite d'une amende qu'il décide de payer plutôt que de respecter la loi sur la parité?

Ensuite, l'UMP revendique 315.000 adhérents à jour de cotisations et on ne la soupçonnera pas une seconde de donner des chiffres inexacts pour on ne sait trop quelle manoeuvre d'intoxication de l'opinion. Onze millions de déficit à combler, ça ne représente jamais qu'environ 35 euros par adhérent, soit, sur un quinquennat, sept euros par an. On a du mal à croire que remontés comme ils le sont contre la politique actuelle, persuadés  d'être le seul recours possible pour la France, les compagnons ne consentiront pas un effort aussi minime.

N'oublions pas qu'après tout ce ne sont pas "les comptes de l'UMP" qui sont rejetés: on parle bien "des comptes de campagne de Nicolas Sarkozy". Compte tenu des tarifs qu'il pratique, si l'ancien président donne une petite cinquantaine de conférences au profit du parti qui le fit roi, il comblera une moitié de la somme manquante. D'ailleurs, certains doivent y penser à l'UMP:

Avant la décision du Conseil, l'entourage de M. Copé n'excluait pas de demander à Nicolas Sarkozy de donner un coup de main pour rétablir les comptes de l'UMP. "Qu'il nous aide à recueillir des dons ! L'UMP a emprunté pour lui onze millions d'euros que l'on ne recevra pas..." (lemonde.fr)

 

 

 

3442790_3_b65e_meeting-de-villepinte-du-11-mars-2012-a-coute_97884311512007b2d95aaaaa8accc4d2Pendant la campagne. Plus de trois millions, rien que pour ce meeting.

Cela dit et sans vouloir faire preuve d'une cruauté hors de propos, le même Copé devrait se faire discret dans cette affaire. Parce que pendant la campagne, il a joué un rôle de tout premier plan. Il déjà le parti avec le titre de secrétaire général (au mépris de ses statuts, l'UMP a vécu sans Président pendant le quinquennat de Sarkozy). C'est d'ailleurs sous cette fonction qu'il a confié dans des conditions... controversées on va dire, des missions à des sociétés créées par deux proches, Bastien Millot et Jérôme Lavrilleux (le Canard enchaîné s'en était amusé, certains, à l'UMP, beaucoup moins).

993537Est-il excessif de dire que Copé fut notoirement incompétent, vu la situation actuelle? Est-il raisonnable de confier des responsabilités nationales à un aussi piètre gestionnaire? Et dans l'immédiat, quels sont les propres efforts personnels que consentira Copé qui à ce jour a conservé la berline de luxe et le chauffeur fournis par l'UMP? (voiture qui s'ajoute à celle que payent les contribuables de Meaux: il faut bien lui transporter quotidiennement les parapheurs, puisque le Maire de cette ville ne l'aime pas suffisament pour y habiter)  

En tout cas, cette décision du Conseil constitutionnel a eu un effet immédiat: Sarkozy vient d'en démissionner. Cela ouvrira-t-il la porte à la correction de cette anomalie constituitionnelle: la présence "de droit" dans une assemblée de sagesd'anciens présidents qui sont par la force des choses "partisans", puisque pour accéder à leur fonction passée ils ont dû batailler ferme sur le plan politique? 

benjamin borghésio