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Front de gauche de Lizy et du Pays de l'Ourq 77
14 octobre 2013

La dette, la dette....

Olivier Berruyer
   
à les_crises
Un nouveau billet vient d'être publié sur Les-Crises.fr : '[Invité] La crise de la dette conduit-elle à un risque de défaut sur la dette fédérale, par
Onubre Einz '

Une proposition de lecture de la Crise budgétaire et financière en cours aux USA 

Ce papier est consacré aux mécanismes de défaut de la dette fédérale. Il répond à une question simple : comment un Etat peut-il être mis en défaut par sa dette. Le cas qui nous intéresse, les Etats-Unis, n’est pas une mince affaire ; il s’agit de la première dette souveraine mondiale.

Il ne s’agit pas ici d’intervenir dans le conflit entre la Maison blanche et les tendances dures du parti républicain au congrès. La presse bruisse des prises de position des uns et des autres.

En revanche, proposer des informations fiables et précises sur la dette et la manière dont elle exerce sa pression sur tous paraît plus pertinents.

Si les républicains font du chantage à la dette et si le président des USA leur dit chiche, c’est que la dette est en elle-même un excellent moyen pour conduire une guerre des nerfs. Cette guerre des nerfs se double d’un blocage budgétaire qui met l’Etat fédéral dans l’impossibilité d’engager des dépenses légalement fautes de disposer de recettes légale. Nous essaierons ici de proposer une lecture des enjeux de cette crise qui vont bien au delà de l’évocation du Tea Party et des passions idéologiques américaines.

A mesure que la dette fédérale totale va se rapprocher des plafonds autorisés par le congrès,  la tension montera petit à petit. Nous traversons en ce moment même cette montée en tension.

Au 30 septembre, la dette fédérale était déjà de 16 738 Md de $, pour un plafond de 16699 Md de $ ; les marges n’étaient plus que de 70 Md de $. Le plafond est donc déjà crevé

Mais déduction faite de dettes mineures – non sujettes à limitation – il apparaît que le Trésor est simplement à la limite du dépassement du plafond de la dette. La dette de marché est en effet de 11,958 Md de $ et la dette du Trésor aux Funds et Trust Funds de 4740 Md de $. Il ne reste plus qu’une marge de 0,025 Md de $ au Trésor selon les comptes du Monthly Statement of the Public Debt (MSPD) du 30 septembre 2013.

Le Trésor en fait reste en deçà du plafond autorisé par des astuces dont le Shutdown d’une partie de la fonction publique fédérale n’est que la partie la plus visible. On pourrait reconstituer ces astuces en dépouillant le Daily Treasury Statement (DTS). Mais sa publication est suspendue depuis le 15 août.

D’un point de vue comptable, il faut considérer que le Trésor est depuis le 30 –09-2013 septembre techniquement à la limite du défaut : après la mi-octobre, il ne pourra plus payer les intérêts de la dette et la paralysie de l’Etat fédéral gagnera lentement toutes les composantes de l’administration. Pour retarder ce défaut, le Trésor a pu jouer des comptes financiers qui peuvent lui offrir des marges : la FED où il a des liquidités, le FMI dont il est un grand créancier ; la comptabilité des crédits accordés pour le compte de tiers (prêts étudiants par ex.), il a aussi pu diminuer ses dépenses. Ce faisant, il n’a fait que différer le défaut qui devient imminent.

Nous verrons que le dit défaut est peu probable.  Mais pour établir ce que serait la mise en défaut technique du Trésor et examiner ce que signifie concrètement un défaut sur la dette, il faut d’une part revenir sur la gestion de la dette depuis 18 mois et d’autre part (A) et d’autre part étudier son roulement (B). Une dette en effet ne se contente pas de s’accumuler, elle doit être l’objet d’un invraisemblable processus de renouvellement représentant des montants d’emprunts pharaoniques. Il devient de ce fait plus facile de comprendre pourquoi le défaut de paiement de l’Etat fédérale n’est pas synonyme de défaut inévitable sur la dette et inversement. La presse et les médias confondent trop facilement l’un et l’autre.

Au final, ll nous faudra alors prendre le risque de proposer une certaine lecture de la crise sans sombrer dans les conjectures à courte vue.

 

A – La gestion des dépenses et des recettes fédérales depuis 18 mois.

L’examen de la croissance de la dette montre que l’administration Obama a anticipé la crise depuis longtemps. En 2012, la dette financière totale augmente encore fortement : 1210 Md de $ en 12 mois (base  de calcul 15222 Md de $ au MSPD au 31-12-2011). La dette de marché augmente aussi régulièrement que la dette aux Funds et Trust funds durant cette année pour supporter l’endettement du Trésor.
C’est à dater du mois de mai 213 que la tendance s’inverse. Par des artifices comptables, la dette est stabilisée autour de 16738 Md de $. La dette aux Funds et Trust Funds diminue faiblement ; la dette de marché est contenue, elle ne connaît que des variations modestes.

Nous ne pouvons pas préciser le détail des artifices utilisés pour ralentir la croissance de la dette fédérale. Le Treasury Bulletin du deuxième trimestre 2013 s’arrête fin juin. Mais, c’est nécessairement en faisant  de la cavalerie que le Trésor a pu continuer à se financer depuis le printemps 2013 sans  que la dette atteigne son maximum légal. Les ressources comptables ne manquent pas pour donner de petites marges au Trésor.  Ces marges n’existent plus aujourd’hui, d’où la situation – très politique – de blocage financier et de blocage budgétaire.

Le souci de réduire la croissance de l’endettement a été d’abord marqué par une réduction du déficit budgétaire. Et ce souci vient de loin : à dater du second semestre 2012 les dépenses budgétaires ont été diminuées. L’effort s’accentue en 2013 à mesure que la deadline du plafond de la dette et des difficultés budgétaires se rapproche.

Le souci de l’augmentation des recettes semble constant. Il est corrélatif d’une « reprise » dont nous avons souvent démontré le caractère artificiel, soit qu’elle se trouve à la remorque du crédit public, soit que des ressorts monétaires l’entretiennent.

Le solde budgétaire – toujours négatif – se résorbe très fortement. Cette résorption s’accélère en 2013 pour atteindre un plus bas fin juillet, ce plus bas rapproche le solde budgétaire de l’équilibre. Au delà de ce mois, les données ne sont plus disponibles.

Ce souci de jouer serré est encore souligné par une autre source. Cette source fait ressortir l’énorme effort de réduction de la dépense publique. Les soldes des dépenses courantes ont été fortement réduites au deuxième semestre 2013. En  ajoutant les investissements aux dépenses courantes, on conçoit que les investissements fédéraux (bâtiments, équipement, logiciels) ont aussi été mis  à contribution pour réduire le déficit budgétaire. On retrouve sur ce schéma la même logique de réduction des déficits : l’administration américaine a augmenté les recettes et stabilisé les dépenses en sacrifiant les investissements collectifs.

On peut donner une petite idée de la manière dont un gouvernement peut s’y prendre pour réduire la dépense publique en hypothéquant l’avenir. Sur ce graphique, on voit que les dépenses d’investissement sont tirées vers le bas à partir du T-4 2012.

Mais c’est le compte capital transfert payment qui apporte une contribution utile à la compréhension des artifices utilisés pour retarder un défaut. La nature de cette ligne de compte – mesurant des mécomptes sur la dette fédérale – indique que le soupçon d’artifices comptables  visant à retarder le défaut de paiements et à ralentir le gonflement de la dette fédérale  n’est pas une vue de l’esprit.

La volonté de différer le constat du franchissement du plafond de la dette remonte donc au moins à un an. Ce souci est manifeste à dater de 2013. Et ce souci s’explique simplement. La gestion de la dette devient explosive si le Trésor est empêché d’emprunter librement sur le marché dans une situation où le budget n’est pas voté. Telle est la situation fin septembre 2013.

B – Le roulement de la dette fédérale et les mécanismes d’un défaut généralisé.

1° Le roulement de la dette fédérale

Comme l’a montré notre premier graphique le financement de la dette totale des USA ne repose plus que sur un pilier, les emprunts sur le marché financier. La ressource des Funds et Trust Funds semble marquer le pas. Et pour cause, les comptes de ces caisses sont contrôlés par le congrès et font partie du budget. Il a donc fallu depuis le printemps que l’administration fasse supporter la croissance des déficits fédéraux uniquement au marché financier pour éviter d’ouvrir une question politiquement très sensible. Les Funds et les Trust Funds garantissent par leurs excédants les retraites et le bon fonctionnement de la sécurité sociale dans un pays dont la population est amenée à vieillir, ces excédants sont convertis en bon du Trésor.

Le financement de la dette s’appuie sur une ventilation des bons du Trésor par maturité. L’année 2013 a été marquée par une réduction des bons du trésor de court terme (T. Bills de moins d’un an) dans le financement de la dette au profit des bons à maturité plus longue : les T. Notes ( 1 an-10 ans) et les T. Bonds (14-30 ans).

Cette évolution est typique d’une consolidation de la dette américaine que la FED assure en achetant les titres longs (5 ans et+) et en administrant les taux d’intérêt depuis les opérations de Twist (été 2011) et les achats massifs de titres qui lui ont succédé (été 2012).

Nous laissons de côte les TIPS ou titre au principal indexé sur l’inflation ; ils jouent un rôle très effacé dans le financement de la dette. Nous écartons aussi la dette de marché non négociable ;  constituée de bons du trésor non fongibles; elle joue un rôle de plus en plus marginal dans la financement de la dette de marché.

Ce graphique occulte toute la complexité du roulement de la dette. En effet, pour que le financement de la dette se fasse par l’accroissement ou la récession du volume des titres distingués par maturité, il ne suffit pas de faire de l’endettement nouveau. Il faut aussi conserver à la dette son niveau actuel, niveau actuel qui résulte de l’endettement cumulé passé.

Si nous regroupons les T Notes et T. Bonds qui joue un rôle croissant dans le financement de la dette de marché et que nous les différencions clairement des T. Bills, nous pouvons voir comment s’accroît le montant de la dette totale sous l’action des émissions nettes de titres.

Les émissions nettes font la différence entre les titres anciennement émis dont le principal est remboursé et les titres nouvellement émis. Les émissions nettes font donc la différence entre les amortissements du principal des titres anciens et les émissions nouvelles de bons du Trésor. Pour que les émissions nettes soient positives, il faut évidemment que le montant des titres amortis soit inférieur au montant des titres nouvellement émis.

Nous avons vu que la consolidation de la dette était le résultat d’un recul du montant de la dette financée par les T. Bills et une affirmation du rôle des titres publics longs (T Notes et T. Bonds). Il est donc logique que les émissions nettes de titres publics longs restent positives et que les émissions de titres publics courts soient négatives.

Le solde des émissions nettes baisse en volume sous la double action de l’entrée dans le négatif des émissions nettes de T.Bills (leur émissions sont inférieures à leur amortissement) et de moindres émissions nettes de titres longs (l’écart entre émissions et amortissements est  donc de moins en moins forte).

Le solde des émissions nettes de bons du Trésor explique comment la dette augmente en période de modification de la ventilation des titres. Mais elle n’explique pas clairement les mécanismes du défaut. Ne plus pouvoir augmenter la dette, ce n’est pas se trouver en défaut : c’est simplement ne plus pouvoir s’endetter plus.

Le défaut surgit quand on considère le mécanisme des amortissements bruts et des émissions brutes de bons du trésor qui sont sous-jacents aux émissions nettes de dette financées par des émissions nettes – positives ou négatives – de titres publics.

C’est de l’interaction du plafond de la dette et de la formation de la dette que naît le défaut.

Pour que la dette augmente  d’un volume de x, il ne suffit pas que l’état d’endette. Il faut encore qu’il soit capable de refinancer sa dette parvenue à échéance, c’est-à-dire qu’il couvre par ses émissions nouvelles les amortissements en cours. Comme le montre le graphique, la croissance de la dette se réduit en 2013 car le volume des émissions brutes de dette (G) se confond avec les amortissements bruts tous titres confondus (H).

L’augmentation de la dette résulte du fait que les émissions brutes de T. Bonds et de T. Notes sont toujours supérieures à leurs amortissements bruts, il y a consolidation  de la dette en raison d’amortissements bruts des T. Bills supérieurs à leurs émissions brutes.

Ce vaste mouvement constitue le roulement de la dette : le jeu des émissions brutes et des amortissements bruts détermine en effet l’augmentation ou la diminution de la dette de marché en période de consolidation.

Le jeu des émissions brutes représente des contraintes de financement gigantesques. Pour la seule dette de marché  – émises en T. Bills T. Bonds et T Notes – les besoins de financement ont varié entre 750 Md de $ et 475 Md de $ mensuel en 2012. En 2013, les besoins de financement ont varié de 475 Md de $ à plus de 700 Md de $ par mois.

L’énormité des besoins de financement du Trésor tient à la maturité des titres : Les bons du trésor étant renouvelés à court terme (52 semaines à 7 Jours), le volume d’émissions brutes nécessaires pour couvrir les amortissement est gigantesque. Bien entendu ce volume d émissions brutes varie avec la maturité des titres : les volumes sont donc plus faibles pour les T. Notes (1-10 ans) et encore plus réduit pour les T. Bonds (14-30 ans) en dépit du fait qu’ils jouent un rôle plus important dans la ventilation du financement de la dette de marché de l’Etat fédéral que les T. Bills.

Un seul chiffre permet de mesurer la dépendance du trésor vis-à-vis du marché financier : Entre le 1erjanvier 2012 et le 15 août 2013, les besoins cumulés de financement ont été de 12692 Md de $ pour que le trésor puisse assurer le roulement de la dette et assurer le financement des déficits publics.

Pour assurer la couverture des amortissements par un volume minimal d’émissions brutes nouvelles de bons du Trésor, il faut au minimum que le Trésor trouve sur le marché des financements égaux aux amortissements en cours. Mensuellement les sommes se situent entre un minimum de 425 Md de $ et un maximum de 700 Md de $. L’absence d’amortissement de T. Bonds s’explique par leur (ré)introduction récente dans le financement de la dette fédérale.

Si le Trésor ne fait pas appel au marché financier ou n’y trouve pas les financements escomptés, il doit alors puiser dans son revenu. Et dans ce cas, il se désendette puisque qu’avec des amortissements supérieurs aux émissions de titre, il y a une dette public dont l’encours baisse. Or il n’y a qu’une manière pour un Trésor de désendetter un pays : jouer sur les dépenses et/ou les recettes.

Il existe donc une relation intime entre la contrainte budgétaire et le risque de défaut sur la dette : l’un et l’autre pèsent lourdement sur  la dépense publique et le niveau d’endettement. Mais de manière différente : le défaut de paiement de l’Etat fédéral résulte et du blocage budgétaire et du plafond de la dette. Le défaut sur la dette résulterait d’une incapacité de l’Etat fédéral à faire face aux contraintes de gestion propres au roulement de la dette : la couverture du principal (émissions au moins égales au amortissement) et le paiement des intérêts.

 

b) Les mécanismes du défaut et le Shuttdown

Les mécanismes du défaut sont relativement simples. Dans le cas américain, le plafond de la dette fixe une limite à sa croissance. L’Etat fédéral ne peut plus dépenser plus qu’il n’a de recette, il doit se contenter d’emprunter sur le marché pour faire en sorte que les amortissements bruts soient couverts par des émissions brutes de bons du Trésor. A priori, il n’y a pas de défaut sur la dette. Lé faut ne survient que sur les intérêts qui excède le solde des émissions brutes  et des amortissements bruts. Il faut donc essayer de comprendre comment survient effectivement un défaut. La difficulté est que le terme est galvaudé au point de ne plus rien signifier et que la presse confond régulièrement défaut de paiement de l’Etat fédéral et défaut sur la dette.

Il faut donc différencier Défaut sur la dette et Shuttdown lié au blocage budgétaire et au plafond de la dette.

B1. Le Shuttdown

Le Shuttdown ne conduit pas au défaut sur la dette puisqu’il consiste a rendre impossible la perception des recettes et l’engagement de dépenses faute de budget voté. Le Shuttdown conduit à l’arrêt programmé des services publics. Au delà d’une très courte période, le Shuttdown suppose de passer un compromis budgétaire partiel pour assurer les fonctions régaliennes de l’Etat (justice, armée, service de la dette) si aucun budget général n’est voté.

Le psychodrame budgétaire peut donc connaître différents rebondissements sans pour autant entraîner un défaut généralisé. Ce compromis partiel est pour l’instant encore dans les limbes.

Le Shuttdown plaçant les finances publiques à la diète, le risque de défaut de paiement recule tant que les déficits sont réduits par le blocage politique entre le Congrès et la Présidence. Pour ce qui est de la gestion de la dette, un accord provisoire à minima doit être être trouvé pour autoriser le trésor à payer les intérêts de la dette fédérale sans que l’administration dispose d’un budget définitif. Un accord budgétaire partiel suffirait pour sortir de l’impasse. En effet, le défaut sur la dette est déclaré si les intérêts ne sont pas servis. Les intérêts à payer excèdent le simple roulement de la dette mettant à égalité amortissement et émissions nouvelles, ce compromis est impératif sinon un défaut sur la dette et un défaut de paiement de l’Etat fédéral se produiront simultanément. A la mi-ocobtre se scénario catastrophe débutera avec pour conséquence  une récession aux USA et un effondrement financier général qui aura pour effet de conduire l’économie américaine à l’abîme. La moitié de la dette fédérale de marché étant détenue par des investisseurs américains, l’autre moitié par des investisseurs américains, l’effondrement économique et financier aux USA se traduirait par une épouvantable récession mondiale.

Nous ne croyons pas à cette perspective, mais  ll n’y a dans notre esprit aucun de doute : le Shuttdown n’est qu’un élément dans une stratégie de la tension où sont enfermés – pour l’instant – l’administration et le congrès. Le vrai facteur de pression induisant un défaut possible, c’est le plafond de la dette, un compromis budgétaire à minima peut rapidement être trouvé avant d’aborder la question du plafond de la dette. C’est le coeur du blocage présent.

B2. Autour du défaut sur la dette.

Le plafond de la dette a cette vertu : il redouble la clé budgétaire posée par un budget absent du fait du refus du congrès de le voter. En effet, dans l’hypothèse où des négociations budgétaires s’engageraient positivement, il faudrait pour qu’elles aboutissent que soit trouvé un accord sur un nouveau montant maximal de la dette fédérale. Or ce montant peut déterminer très strictement les marges de progression de l’endettement du Trésor par son volume autant que par son échéancier.

Derrière le débat sur l’Obamacare se dissimule très probablement la volonté des républicains d’infléchir la politique de la dépense publique dans un sens très restrictif. Pour ce faire, ils se sont placés en situation de force.

Les Républicains ont en effet une excellente main financière. Ils peuvent se fixer pour objectif une réduction des déficits via le chantage au budget et au relèvement du plafond de la dette. Le jeu sur les dépenses et les recettes est à leur avantage.  Mais ils peuvent aussi imposer cette réduction en position de force. En effet, si un compromis provisoire sur le budget est trouvé , le plafond de la dette et son échéancier obligeront l’administration à réduire les déficits budgétaires et financiers, le plafond de la dette est en effet compatible avec un budget provisoire car à terme il fixe mécaniquement les limites d’un budget définitif en fisant un maximum à la dette.

Dans tous les cas de figure, les Républicains sont en situation de « cadrer » le budget et de définir les limites des futurs compromis. Le plafond de la dette et le budget 2014 sont intimement liés.

Le compromis sur le plafond de la dette conditionne et redouble un vote du budget conforme à ce que souhaitent les républicains de la chambre des représentants. Le relèvement du plafond est donc intimement lié à la négociation budgétaire.

Le mécanisme du défaut sur la dette n’est donc pas à l’ordre du jour sauf si les intérêts de la dette ne pouvait pas être payé faute d’un désaccord persistant. En cas de budget voté au terme d’un compromis, l’arbitrage d’une administration confrontée à un plafond de la dette faiblement augmenté ou révisable à court terme (6 mois par exemple) pourrait être soit de réduire la dépense publique – si les termes de l’accord budgétaire ne sont pas respectés, soit de ne plus payer les intérêts de la dette, les recettes n’étant pas modifiables. L’étape ultérieure serait de gagner des marges en suspendant tout ou partie des amortissements bruts de la dette. Le défaut est alors constaté deux fois : une fois sur les intérêts de la dette, une fois sur le principal. C’est pour un pays endetté à 100 % de son PIB un véritable suicide financier.

C’est la raison pour laquelle nous croyons qu’un compromis partiel sera rapidement trouvé sur budget et sur le plafond de la dette. L’administration Obama aura ensuite les mains liées.

La crise actuelle – centrée sur l’Obamacare qui lui sert de prétexte -n’implique donc pas de risque de défaut réel sur la dette fédérale sauf si les républicains et l’administration Obama deviennent idiots. Cette crise induit ponctuellement une crise des paiements de l’Etat fédéral et, partant, une moindre dépense : c’est le Shuttdown. Cette crise oblige à une négociation serrée du plafond de la dette et à un difficile compromis budgétaire : l’un et l’autre visent à placer sous contrôle le budget de l’Etat fédéral et à encadrer financièrement toute progression des déficits de ce dernier. C’est une manière de tutelle qui permettra aux républicains de piloter à distance l’administration Obama. Nous ne serions donc pas surpris de voir la négociation sur le plafond de la dette déboucher sur le relèvement du plafond à court terme et sur le vote d’un budget restrictif en matière de dépense et de déficit.

A cette heure, on comprend que les positions soient inconciliables : l’administration Obama veut bien négocier les dépenses après l’acceptation de son budget et le relèvement du plafond de la dette. Elle ne serait ensuite plus contrainte à réduire trop fortement les dépenses. Les Républicains souhaitent que la baisse des dépenses soit synchrone avec l’établissement du budget et avec le relèvement du plafond de la dette. Ils tiennent de cette manière l’administration Obama.

C’est ce nœud de calculs contradictoires qui pourrait tout faire déraper.

 

Conclusion.

Le risque de défaut sur la dette agitée à Washington et dans les médias français est l’élément public d’une stratégie de tension politique visant à imposer à l’administration Obama un véritable Canossa sur l’Obamacare ou à défaut une mise sous-contrôle. Le défaut de paiement de l’Etat fédéral est un instrument plus réel et plus efficace qu’un jeu explosif sur la dette financière dont nul ne peut souhaiter le défaut. Les conséquences en seraient catastrophiques. Il n’y a pas d’alternative au compromis, mais Républicains et administrations ne peuvent s’en avoir la même conception.

L’intérêt des républicains est d’obtenir une diminution des déficits, fut-ce au prix d’un ralentissement économique marqué ; l’économie américaine dépendant encore de la dépense publique et de la politique – non moins dépensière – de la FED. Un fort ralentissement économique en fin de mandat démocrate doublé d’un discours anti-fiscaliste primaire permettrait aux républicains d’aborder les élections présidentielles dans les meilleures conditions. La crise présente contient ces éléments.

L’intérêt de l’administration Obama est de continuer à soutenir l’économie par une politique de crédit public, certes moins généreuse, mais toujours indispensable. L’économie américaine est en effet passée d’une relance à la remorque du crédit public à une combinaison de moyens mêlant le soutien à l’activité par la dévaluation du dollar (favorable aux exportations), l’augmentation des entrées nettes de revenu des capitaux (favorable au gonflement du revenu et à la croissance), le soutien de la FED à la construction et l’habile utilisation des amortisseurs sociaux pour doper une consommation frappée par la faiblesse des salaires et des niveaux encore très élevés de chômage (9 % si l’on tient compte de la baisse du taux d’activité de la population qui diminue mécaniquement la population active).

L’administration Obama a donc besoin d’un budget avec des déficits encore importants (3-4 points de PIB) et d’un relèvement du plafond de la dette commenssurée aux déséquilibres budgétaires visés. Les républicains ont tout intérêt à les mettre en difficulté quitte à peser négativement sur le rythme de la « reprise ».

L’hypothèse d’une prise en otage de la dette conduisant au défaut peut toujours être faite. Mais c’est supposé que les passions idéologiques ont atteint un tel niveau d’incandescence aux USA qu’aucun compromis n’est possible entre l’administration et le Congrès. Rien ne permet de soutenir cette thèse séduisante.

Cette crise s’apprête à faire deux victimes : la crédibilité financière des USA et la croissance économique. Plus le Shuttdown sera long, plus la croissance américaine sera affectée, plus les déficits seront réduits moins la croissance sera forte. Et plus les compromis sur le budget et le plafond de la dette seront longs à trouver, plus l’impact sera négatif sur la confiance que les investisseurs feront demain au Trésor.  On peut déjà prévoir un effet de hausse des taux d’intérêt de la dette publique.

Nous aurons l’occasion d’expliquer dans un prochain papier pourquoi ce risque n’est pas négatif pour la croissance américaine sous réserve que la FED poursuive sa politique d’administration de la dette et des taux d’intérêt avouée depuis l’été 2011.

Onubre Einz.

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